La campagne « Communes du commerce équitable », un outil au service du développement durable
En septembre 2015, au Sommet des Nations unies de New York sur le développement durable, plus de 193 chefs d’Etat et de gouvernement ont adopté à l’unanimité un programme mondial audacieux intitulé : Transformer notre monde, le programme de développement durable à l’horizon 2030.
Il s’agit d’un plan d’action poursuivant 17 objectifs en faveur de la paix et la sécurité, de la lutte contre la pauvreté et la faim, de la protection de l’environnement et du travail décent.
Tous les pays du monde, quel que soit leur niveau de développement, seront impliqués dans la mise en œuvre de ce programme. Les 17 objectifs visent, en effet, des problèmes qui les concernent tous, et chaque nation est tenue d’y apporter une réponse à son niveau, selon son propre contexte.
La Belgique a donc, elle aussi, approuvé ce programme et doit s’atteler à la tâche. Chez nous, les différents niveaux de pouvoir ont leur part de responsabilité, tel que le niveau communal, le plus proche du citoyen. Mais une commune va au-delà du pouvoir politique : une commune c’est également une myriade d’acteurs qui vivent, consomment, apprennent, font appel à des services, s’organisent collectivement, s’associent, se promènent, travaillent, agissent, créent, etc. En effet, une commune rassemble citoyen.ne.s, commerçant.e.s, établissement horeca, entreprises, associations, écoles, maisons de jeunes, centre culturel, enseignants et écoles, bibliothèque, centre sportif, etc. L’ensemble de ces acteurs peut également apporter sa pierre à l’édifice et contribuer, avec ses forces et motivations, à atteindre ces objectifs.
A nous d’agir aussi … maintenant !
Le plus grand défi est à présent de les mettre en œuvre. Chacun peut y contribuer à son niveau au quotidien ! C’est important et il y a urgence ![1]. Qui plus est, d’après une étude commandée par l’Institut fédéral pour le développement durable (IFDD), publiée en octobre 2017, la Belgique doit encore fournir de nombreux efforts pour atteindre les ODD d’ici à 2030, notamment en matière de lutte contre la pauvreté et de production et de consommation responsables[2].
« Communes du commerce équitable » fait partie des initiatives accessibles à tout un chacun.e qui permet d’atteindre, notamment, le 12ème objectif qui « vise à promouvoir la production durable —prix équitables à des conditions de travail décentes pour tous les producteurs — et sensibilise aux modes de consommation [3]». Une initiative au cœur de votre commune qui répond de manière efficace aux enjeux et réalités que connaissent tant les travailleurs et travailleuses du Nord que du Sud.
Comment agir dans sa commune ?
La campagne « Communes du commerce équitable » (CDCE) existe dans le monde entier (« Fair Trade Towns Campaign ») et chez nous, elle est active dans tout le pays avec plus de 200 communes impliquées. A Bruxelles et en Wallonie, près de 31 communes sont communes du commerce équitable et près de 70 communes sont actives dans la démarche[4].
Concrètement, elle s’articule autour de 6 critères :
- Autorité communale : le Conseil communal vote une résolution en faveur du commerce équitable dans laquelle il signifie la participation de la commune à la campagne; il engage l’administration communale à consommer deux produits issus du commerce équitable (dont le café).
- Commerces et Horeca : un certain nombre de commerces et horeca (en fonction du nombre d’habitants) proposent à leur public des produits issus du commerce équitable.
- Entreprises, organisations et écoles : ces acteurs proposent des produits issus du commerce équitable à leurs publics et les sensibilisent à la thématique.
- Communication et sensibilisation : communication régulière vers les médias et organisation d’au moins un évènement annuel à destination du grand public.
- Comité de pilotage : il est constitué pour assurer et coordonner la dynamique sur le territoire.
- Produits agricoles locaux et durables: la commune ne limite pas son engagement au commerce équitable de produits du Sud mais soutient aussi une initiative en faveur des produits agricoles locaux et durables.
Une campagne à tous les niveaux : politique, économique et éducatif
Comme dit plus haut, chaque citoyen.ne peut amener sa pierre à l’édifice selon ses talents et envies :
Au niveau politique, les élus communaux peuvent s’inscrire dans la campagne et valoriser leur engagement.
Par exemple, Enghien a réussi en moins d’un an à impliquer les acteurs locaux. Au-delà de la consommation de minimum deux produits du commerce équitable, la commune intègre dans ses marchés publics les principes du commerce équitable comme critère de sélection pour l’ensemble des produits issus des pays du Sud. D’autres communes ont fait le même pas comme Bastogne, Eghezée, Tournai, etc. +PHOTOS ENGHIEN
Cette démarche reste encore minoritaire alors que des guides et mode d’emploi d’achats durables existent pour aider les responsable achats des communes[5].
Il est primordial que les communes s’engagent activement pour plus de justice dans l’organisation de la production et de la consommation. Par cet engagement et par sa consommation, la commune montre que c’est possible, que des alternatives existent, qu’elles sont à la portée de tout un chacun.e.
Au niveau éducatif, les écoles peuvent mettre en place des projets autour de la consommation responsable. Par exemple, le Lycée Mater Dei et le collège XXIII de Woluwé-Saint-Pierre + PHOTOS
Au niveau économique, les entreprises, commerces et établissements Horeca peuvent proposer des produits équitables et locaux à leur public. Par exemple, Agricovert – une coopérative de producteurs/trices et de consommateurs/trices avec comptoir de vente situé à Gembloux – allie parfaitement produits issus du commerce équitable du Sud et produits locaux. D’ailleurs, la coopérative est depuis peu membre de la BFTF (Belgian Fair Trade Federation). La BFTF est une plateforme qui rassemble des entreprises et des associations actives dans le commerce équitable en Wallonie et à Bruxelles dont est membre par exemple, Oxfam-Magasins du monde, Ethiquable, l’envol du colibri et le miel Maya, pour les plus connus. Depuis 2015, la fédération a ouvert les candidatures aux groupements de producteurs acteurs d’un commerce équitable « local ». Cette décision a permis à des coopératives comme Agricovert de devenir membre de la fédération. Toujours à la recherche de fournir le prix le plus juste au Nord comme au Sud, cette reconnaissance officielle est une vraie victoire pour Agricovert. En effet, non seulement elle informe le consommateur d’une reconnaissance officielle comme organisme de commerce équitable mais en plus, elle permet à la coopérative d’échanger et de partager des bonnes pratiques avec d’autres organisations de commerce équitable.
Ici la coopérative est un véritable lieu de vente pour les producteurs/trices de chez nous. Toutefois, le monde agricole paysan n’a pas toujours un accès aussi facile au marché local. Or cet accès est primordial à la pérennité de leur activité. Il faut donc donner les moyens aux agriculteurs et agricultrices de commercialiser leurs produits auprès des citoyens. A Soignies, par exemple, un espace de vente dédié aux produits de chez nous a été aménagé sur la place de la ville chaque vendredi du mois. Une belle initiative en faveur des produits de chez nous ! + PHOTOS SOIGNIES
Notons aussi les nombreuses rencontres en tout genre organisées dans les communes de Wallonie et à Bruxelles. Par exemple, à Bastogne et ce depuis deux ans est organisé une chasse aux œufs équitables dans le parc de la ville. Egalement, à Eghezée, une journée dédiée aux alternatives a été organisée en octobre 2016. Au programme : petit déjeuner équitable suivi de la projection du film « Demain » avec débat et finalement un forum des associations locales actives dans « l’autrement » était proposé. Autant de moments festifs et conviviaux qui permettent d’attirer et de sensibiliser un public peut-être moins informé et convaincu par un commerce plus juste, solidaire et durable.
[1] Service Public Wallonie. « Objectifs du développement durable ». Site internet : wallonie.be.
[2] Lalmand, Eric (2018, janv.). « Développement durable : 6 nouveaux ambassadeurs pour promouvoir les objectifs belges. Rtbf Info. Site internet.
[3] Enabel. « Les objectifs du Développement durable ». Site internet : enabel.be.
[4] Voir la liste des communes sur www.cdce.be.
[5] Voir par exemple les outils proposés par le SPW ; un helpdesk est aussi à disposition des acheteurs publics